Alors que nous continuons notre exploration des glaciers de la Cordillère de Darwin, en Patagonie, nous nous approchons du glacier Marinelli. Les anciennes cartes marines relevées par les coéquipiers de Darwin nous donnent des renseignements précieux pour en comprendre l’évolution. En 1834, les cartographes font figurer le front du glacier au milieu de la Bahia Ainsworth. Coup de théâtre : alors que nous arrivons sur zone, le glacier est invisible ! Il n’a en réalité pas disparu, mais s’est retiré beaucoup plus au sud… à exactement 15 kilomètres de la position relevée par les cartographes du XIXe siècle. Inès Dussaillant, la glaciologue chilienne qui nous accompagne, témoigne d’une réalité glaçante : cette fonte du seul glacier Marinelli représente la perte de 16 billions de litres d’eau (16 000 milliards de litres), soit la consommation en eau potable de l’humanité entière… pendant 3 ans ! J’aimerais pouvoir associer à ce témoignage une action positive locale, comme au Brésil, où planter des arbres constitue une vraie solution à la déforestation. Mais ici, en Patagonie, nous ne planterons pas de glaçons pour sauver les glaciers. L’enjeu est plus grand : c’est de notre capacité collective à diminuer notre usage des énergies fossiles que dépendra le futur de la Cordillère de Darwin et de sa biodiversité.